Les exportations ivoiriennes d'anacarde, café et cacao vers les États-Unis sont désormais taxées à 21%, menaçant l'économie locale et les revenus de milliers de producteurs.
La Côte d'Ivoire fait face à un droit de douane de 21% sur ses exportations vers les États-Unis. Cette décision de l'administration Trump, annoncée le 3 avril 2025, affecte directement plusieurs filières stratégiques de l'économie ivoirienne, dont l'anacarde, le cacao et le café, qui constituent une part significative des exportations du pays vers le marché américain.
Selon les données de la Maison Blanche, ce taux de 21% représenterait une réponse aux 41% de droits de douane que la Côte d'Ivoire imposerait aux produits américains. Cette augmentation tarifaire s'inscrit dans une politique plus large touchant 50 pays africains, avec des taux variant de 10% à 50%, indépendamment du niveau de développement économique des nations concernées.
Impact sur les filières agricoles ivoiriennes
Le secteur de l'anacarde apparaît comme le plus vulnérable face à cette nouvelle barrière douanière. La Côte d'Ivoire, premier producteur mondial de noix de cajou avec une production annuelle dépassant 900 000 tonnes, exporte une part significative de sa production vers les États-Unis, où la consommation de noix de cajou connaît une croissance constante.
Selon les estimations du Conseil Coton-Anacarde (CCA), cette taxe de 21% pourrait entraîner une baisse des prix d'achat aux producteurs ivoiriens allant jusqu'à 15%, affectant directement les revenus de plus de 400 000 familles dans les zones de production du centre et du nord du pays. Les exportateurs ivoiriens se trouvent face à un dilemme : absorber une partie de la taxe pour rester compétitifs ou répercuter l'intégralité de la hausse sur les prix, au risque de perdre des parts de marché.
Les filières cacao et café, bien qu'exportant principalement vers l'Europe, pourraient également souffrir de cette situation. Les États-Unis représentent le troisième marché d'exportation pour ces produits, avec une valeur annuelle estimée à 200 millions de dollars. La réorientation de ces flux commerciaux vers d'autres marchés nécessiterait des ajustements logistiques et commerciaux complexes.
L'économiste Meissa Babou note que « les avantages dont bénéficiaient les Africains grâce à l'AGOA ne se retrouvent pas en Europe. En effet, les normes commerciales européennes, souvent très exigeantes en matière de qualité des produits, représentent un obstacle majeur ».
Réponses et stratégies d'adaptation
Face à cette situation, le gouvernement ivoirien a annoncé la création d'une cellule de crise réunissant les ministères du Commerce, de l'Agriculture et des Finances. L'objectif est d'élaborer une stratégie pour limiter l'impact de ces taxes sur l'économie nationale et soutenir les secteurs affectés.
Plusieurs pistes sont envisagées, notamment l'accélération de la transformation locale des matières premières pour exporter des produits à plus forte valeur ajoutée, moins sensibles aux variations tarifaires. Cette stratégie s'inscrit dans la politique de transformation structurelle de l'économie ivoirienne défendue par les autorités depuis plusieurs années.
La recherche de marchés alternatifs constitue une autre voie explorée. Les exportateurs ivoiriens examinent les possibilités d'augmenter leurs parts sur les marchés asiatiques, particulièrement en Chine et en Inde, où la demande pour les noix de cajou et le cacao connaît une croissance significative. Comme le suggère Meissa Babou, « la Chine pourrait représenter une nouvelle voie prometteuse pour les exportateurs africains » avec « une économie puissante et une population immense qui consomme presque tout ».
L'Union européenne reste également un partenaire commercial privilégié, bien que les exigences normatives y soient plus strictes. Les accords de partenariat économique (APE) avec l'UE pourraient offrir une alternative partielle à l'AGOA américain, à condition de surmonter les obstacles techniques au commerce.
Cette nouvelle donne commerciale intervient à un moment où la Côte d'Ivoire cherche à diversifier son économie et à réduire sa dépendance aux matières premières agricoles, un objectif que les nouvelles taxes américaines pourraient paradoxalement accélérer en forçant une réorientation stratégique des filières d'exportation.
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